jeudi 25 septembre 2008

Elle a bon dos la nature

Ne vous inquiétez, je ne suis pas en train d'écrire un billet contre nature. En fait, j'aurais dû donner un titre plus explicite sur le sujet du jour car j'aurais fait un tabac dans Gogole.
En effet, aujourd'hui je vais vous parler de sexe, de cul, des codes sexuels en vigueur et vous allez voir que la nature a bon dos. On la sort à toutes les sauces pour justifier l'injustifiable à savoir...je vous le donne en mille: la domination de la moitié de la population sur l'autre moitié.

Je me suis souvent posée pas mal de question sur la façon dont la sexualité est perçue, vue, abordée, vécue. Je me suis souvent demandé pourquoi les femmes simulent, pourquoi elles sont si nombreuses à déclarer jouir plus en savourant un carré de chocolat qu'en passant une nuit avec leur conjoint, pourquoi le sexe est assimilé aux plaisirs de la pénétration alors qu'il semble que près de 75% des femmes déclarent ne rien ressentir voire avoir mal lors de la pénétration.
Pourquoi? Pas bien compliqué. C'est parce que ce sont les hommes qui, une fois de plus, imposent leur modèle de la sexualité.

J'ai commencé à réfléchir plus sérieusement à la question après la lecture du seul ouvrage traduit en français d'Andrea Dworkin Pouvoir et violence sexiste et son analyse sur le pouvoir qu'ont les hommes de nommer.
J'y ai réfléchi encore plus après avoir lu son formidable Intercourse (pas de traduction française) et quelques essais sur la pornographie et la prostitution.
J'y ai encore réfléchi en me documentant sur l'excision.

Tout montre que c'est le plaisir de l'homme qui compte. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à écouter ce que les défenseurs et défenseuses de l'excision disent: c'est une tradition, ça a toujours existé mais aussi et surtout: cela freine les envies sexuelles des femmes. Autrement dit, les priver de plaisir pour les garder vierges jusqu'au mariage et les garder fidèles.
Quand on sait que dans les cas d'infibulation (environ 20% des cas d'excision), c'est à la fois le clitoris mais aussi les petites et les grandes lèvres qui sont amputées puis que les moignons sont cousus ensemble à l'aide d'épines, rendant toute pénétration impossile, on comprend qu'elles n'aient pas envie de goûter aux plaisirs du sexe. Le soir des noces, le mari va réouvrir au couteau la cicatrice. Ca donne envie de faire des galipettes sous la couette hein!
Sans rire, le clitoris est assimilé au phallus et doit être réduit à néant!
Mais si on suit cette logique, cela veut dire que les femmes des peuples qui ne pratiquent pas l'excision sont toutes lubriques et avides de sexe. Cela se pourrait puisque très souvent nous entendons les "putes" et "salopes" pour désigner un individu du sexe féminin. Une femme qui a plusieurs amants dans sa vie est une salope, une femme qui refuse de coucher le 1er soir est aussi une salope tout ça parce qu'elle se permet de décider ce qu'elle veut ou non.
Ce que je ne comprends pas non plus c'est que pendant que l'on calme les femmes en les excisant, les insultant, les hommes, eux, ont le droit, voire même le devoir, d'accumuler les conquêtes, d'avoir plusieurs femmes. C'est ce qui prouve leur virilité dit-on.

Dans nos pays dits "civilisés" où l'on n'excise pas les filles physiquement nous avons d'autres moyens coercitifs: elles sont qualifiées de salopes et respecte-t-on une salope? Non car elle demande elle-même l'irrespect. La salope aime se faire baiser et elle en redemande.
On donne du porno à tout va. En un seul clic sur internet vous pouvez assister à des scènes de viol. Les productions porno où les femmes sont trainées par les cheveux, giflées, fessées, prises par tous les trous sont légion. Dites que cela vous choque et l'on vous traitera de puritain-e et de coincé-e. La libération sexuelle des femmes ne les a pas libéré. Cela leur a permis d'apparaître au grand jour dans une position de soumise qui adore être fouettée et attachée. Elle sont libres d'être dominées et torturées.
Même dans le porno "soft" c'est le plaisir masculin qui prime. Même sans tirage de cheveux, sans mise en scène SM, le film porno éclipse volontiers les préliminaires, dans le meilleur des cas nous montre 10 secondes de cunnilingus et tout le reste, les 20 à 30 minutes restantes c'est pour la pénétration et la fellation. Le clitoris tout le monde s'en fiche puisque c'est ce qui donne du plaisir à la femme.
La banalisation du porno a pour conséquence que les hommes croient qu'ils doivent se comporter ainsi et que les filles pensent que si elles n'aiment pas ça elles ne sont pas normales.

Je ne dis pas que c'est se qui se retrouvent partout mais quand on voit comment s'habillent les adolescentes, comment elles se surnomment entre elles ( salope, bitch), lorsqu'on sait que des magazines pour filles ado leur suggèrent de faire passer le plaisir de leur copain avant le leur (nombreux exemples sur Sysiphe ), que de nombreuses femmes simulent, ça me fait mal.

C'est là que la question de la nature arrive. Il est vrai que les femmes ont un vagin, un corps caverneux et que les hommes ont un pénis, un phallus pénétrant.
Mais pourquoi la sensation de domination est-elle assimilée à la pénétration. Pourquoi la pénétration est un acte d'intrusion? Et surtout pourquoi tout ce mépris face aux pénétré-es. Avez-vous réfléchi à la signification du doigt d'honneur? A l'insulte "enculé-e"? Je te pénétre donc je te domine. Une femme ne peut par conséquent qu'être dominée. Et ce avec la preuve de la nature. Vagin=trou Trou=espace à envahir donc le sexe de l'homme envahit naturellement le sexe de la femme.
Je me demande d'ailleurs très sérieusement si tant de femmes ne sentent rien lors de pénétration ce n'est pas par refus inconscient d'être "enculées et baisées".
Et la haine des gay, a votre avis d'où vient-elle? Et bien ce ne sont pas des hommes car un homme ne se fait pas enculer. C'est réservé aux femmes, aux sous-humains.

Mais pourquoi ne pas le voir d'une autre façon? Ce pourrait être la femme qui "avale" l'homme. C'est la nature aussi non? Un trou qui absorbe. C'est d'ailleurs de là que vient cette peur ancestrale qu'à l'homme pour la castration. Cette idée est incompatible avec leur volonté de domination, il faut donc la détruire. Comment? A une certaine époque en condamnant pour sorcelleries les femmes se voulant libres et libérées, aujourd'hui en leur imposant les modèles de la pornographie. Il n'y a qu'à prendre l'exemple de l'essor du lapin Play Boy pour s'en convaincre. Le porno est entré dans la normalité.

N'allait pas croire que je suis anti-sexe. Il ne s'agit pas de ça. Il s'agit de changer la donne pour que le plaisir des femmes soit aussi pris en compte et respecté.
Par exemple pourquoi toutes les scènes de fellation montre la femme à genoux devant l'homme? Il me semble que d'autres positions moins humiliantes existent. Pourquoi obligatoirement être à genoux?
Et pourquoi faire croire qu'il s'agit d'une pratique normale alors que cela répugne beaucoup de femmes?

En ce qui concerne les règles aussi. Pourquoi est-ce sale? On entend souvent "c'est la nature". la nature est donc sale? Aujourd'hui encore les règles sont un sujet presque tabou même si cela à tendance à s'arranger. On en parle plus mais il n'y a qu'à regarder les pubs pour les tampons pour voir que c'est encore sale. C'est pourtant un aspect naturel de la sexualité. Croyez-vous que le sperme soit plus ragoûtant? Et en plus il est maintenant de bon ton de dire qu'elle l'avale, la salope! Qu'un homme touche ou pire, avale du sang menstruel inspire le dégoût. On n'en parle pas. Même si ça doit bien arriver parfois. Mais qu'une femme avale la semence visqueuse du mâle et en redemande, ça c'est super excitant.

Chacun, chacune fait ce qu'il-elle veut dans son intimité. Personne ne devrait imposer de "modèle à suivre". Et ce qui me dérange le plus c'est que c'est sous couvert de "c'est la nature".
La nature n'est pas machiste. C'est l'interprétation humaine de la nature qui l'est.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

En fait, je pense que le sexe de la femme fait peur, justement parce qu'il est interne et donc, on n'a aucune prise dessus.

C'est un peu comme un enfant à qui on demande d'aller la nuit en forêt, il va avoir peur. Donc ce qui nous fait peur, on le détruit ou on se l'approprie.

Dans de nombreux mythes, il y a une "femme dévorante", chez les Amérindiens, c'est la femme cactus je crois, qui dévore le sexe de Coyote, le trickster. Et sur les bas reliefs d'anciennes églises celtes, il y a des représentations de la Sheela-Na-Gigg, une femme au sexe béant et orné de dents.

ennA a dit…

Ce qui me dégoûte et choque en ce moment et que je passe peut-être aux yeux de certains et certaines comme une coincée, c'est la banalisation du porno et de retrouver les actrices du X invitées régulièrement dans les émissions télé pour vendre un salon, un dvd ou bien à l'inverse, un album. Puisque apparemment le porno mène à la chanson et à la télé.
Je ne parle même pas des radio libres.

Alice a dit…

Insium, c'est très juste. A ce propos, as-tu vu le film Teeth?

ennA, c'est choquant car on met le modèle porno comme LA référence en la matière et le problème c'est que le porno est machiste. Ce qui est encore plus pervers c'est que ce sont les actrices, donc des femmes (à mon avis soit manipulées soit forcées soit machsites elle-même) qui sont invitées sur les plateau télé et qui affirment que si si si le porno c'est très bien, sucer à s'étouffer, avaler, être humiliée c'est le comble du plaisir et c'est ce que toute les femmes veulent. Ca me répugne et ça m'horrifie.

Anonyme a dit…

ah ça libère d'écrire tout ça hein ;o) mais tu sais je crois pas que l'homme ignore le clitoris parce qu'il n'y pense pas, il l'ignore sciemment, il y a une volonté de ne pas connaître le sexe d'une femme. et les médias hyper sexistes reflètent cela, les médias sont les éducateurs et prescripteurs aujourd'hui.

Alice a dit…

Je pense exactement comme toi Emelire.