mardi 15 juin 2010

Le plaisir retrouvé...

...de pouvoir se promener seule. Oui seule, comme une grande, comme une personne entière et responsable sans avoir besoin de papa ou de chéri-mari.

Ce bonheur, je l'ai savouré à mon arrivée au Danemark il va y avoir 8 ans maintenant. Je me souviens en avoir presque pleuré. J'allais partout à toute heure. J'allais en pantalon, en pantacourt, en T-Shirt col montant, en débardeur décolleté, en robe courte bustier, en short, en pull, en manteau. Personne ne m'a jamais fait la moindre remarque, personne ne m'a jamais scrutée du regard, personne ne m'a touchée. Jamais. Jusqu'à ma dernière année là-bas et les "salut ma belle" avec regard juge et jaugeur qui commençaient à essaimer un peu partout à tout heure.
Et oui, rien n'est jamais définitif. Les choses changent parfois.

Je suis revenue en France. J'ai renoncé plusieurs fois à sortir quand ce n'était pas absolument nécessaire. Du "Salut ma jolie" au "sale pute je vais te tringler" en passant par le gars qui se lèche les lèvres en me toisant de haut en bas, j'ai tout entendu, tout vu et pourtant je ne m'appelle pas Arias et mon père ne s'appelle pas La Bruyère.
J'ai subi 2 attouchements dans le métro, bien visibles. Personne qui ne bouge bien sûr mais qui me regarde comme si j'étais hystérique de gueuler autant.
Les commentaires dans la rue, dans le métro, dans les parcs et même les administrations c'était vraiment habituel. Pas rare du tout. Que je soit de retour de l'Opéra en robe noire satinée, maquillage et talons hauts ou de retour de mon cours de danse avec mes cheveux défaits, mon pantalon large de danse un peu style sahrouel , T-shirt ultra large et baskets aux pieds.

On appelle ça de la "drague" voire de la "galanterie française". Moi j'appelle ça de l'intimidation et des agressions sexistes.
Bizarrement, Skat n'a jamais eu le moindre commentaires de la part de filles. Et quand nous étions tous les deux, personne ne venait rien me dire ni me regarder.
Mais quand j'étais seule, j'étais une proie. Seule donc sans protection mâle, sans "propriétaire". Ben oui quand même on est civilisé. On vole pas la femme du voisin.

Depuis que j'ai à nouveau changé de pays, jamais un regard, jamais un commentaire pour le moment. Que ce soit dans la rue, dans le métro, les parcs, partout. Ah si pardon! Un jour j'ai entendu à mon égard un "Salut ma belle". C'était un homme d'au moins 75 ans. Alors vrai vicelard ou personne âgée qui "joue" au papy? Les "salut ma belle" et les "salut mon beau" sont courants sans que cela ne revête une signification spéciale. Skat a aussi y a droit.

Est-ce que ça va durer? je l'ignore. Je ne peux que l'espérer. En tout cas pour l'instant j'ai l'impression d'être en vacances. Quel soulagement de pouvoir sortir sans peur, sans appréhension. Même si je sais qu'il doit s'en passer ici aussi. Au moins l'ambiance n'est pas anxiogène. Ca compte beaucoup.

Voici une campagne galloise vue chez Michelle Julien
Je suis allée à Cardiff. Pas longtemps et avec des amis. Je ne m'y suis pas sentie bien. Je m'y suis sentie "femme" par opposition au "mâle". Sans doute pour ça:






Visitez le site de la campagne


Sinon je suis allée plusieurs fois à Londres et je ne m'y suis pas sentie mal à l'aise. Pourtant j'y étais souvent de nuit, dans des gares et toujours seule.
Mais c'est clair que les papiers collés dans les toilettes femmes de l'Opéra de Covent Garden avisant de faux taxi-vrais violeurs dans tout Londres fait l'effet d'une douche froide.

5 commentaires:

maman@home a dit…

A New York et même d'autres villes comme Boston ou Chicago idem aucune réflexion, aucun geste déplacé. Ca m'avait marqué... assez pour me rendre compte qu'en France c'est de la folie quand même. Par contre j'avais eu le droit à un "she's beautiful but she smokes" une fois dans la rue... je fumais à l'époque... j'ai d'ailleurs commencé là bas.

Michelle Julien a dit…

eh bien, ça fait froid dans le dos cette description minutieuse de harcèlements urbans ! - et je confirme qu'en angleterre , c'est différent et moins pesant pour une femme de sortir avec un tshirt moulant et une jupette au-dessus du genou... Bon courage, Alice !

Alice a dit…

maman@home, Heureusement qu'il y a pas mal de villes qui échappent à la règle. J'ai aussi entendu beaucoup de bien de NY à ce sujet. Mais la remarque "she smokes" est culottée quand même. Surtout que je ne crois pas qu'on l'aurait dites si tu étais un homme (ou alors je suis vraiment parano).

Michelle Julien, maintenant je passe mon temps à espérer que Barcelone va rester autant indifférente à mes sorties et mes tenues. Pas du tout envie que ça vire à la parisienne. Et y'a pas que Paris, quand j'étudiais, j'étais dans le sud et j'en ai entendu aussi!

Stéphanie a dit…

Même sentiment en Espagne.
Un jour, j'en avais même parlé avec un cousin qui vit dans le 93 : en rentrant de soirée, il tenait absolument à me raccompagner (on ne logeait pas au même endroit) - je disais qu'il n'y avait pas besoin - passe une jeune femme en micro jupe blanche qui laissait trop voir - il commente : "En France, elle ne pourrait pas sortir seule, elle aurait des ennuis".

Par contre, je ne sais pas si c'est toute la France ou juste Paris, ou principalement les grandes villes, ou je ne sais pas - ou bien je suis particulièrement moche et/ou aveugle. Au bout d'un moment je crois que je ne fais plus vraiment attention à tout ça, et ce n'est pas une bonne chose. Aussi, j'ai la chance de ne jamais prendre de bus ou tram bondés (je vis dans un trou paumé où seules 3 personnes montent dans le bus pour aller), donc ça aide.

Mais j'ai tendnace à m'énerver très fortement quand quelqu'un me regarde (je déteste qu'on me regarde, aussi, faut dire), parfois j'hésite même sur ma tenue en fonction de ce que je vais faire. Hier par exemple j'avais ma soutenance de mémoire et j'ai fait l'erreur de me mettre en robe avec un très léger décolleté (léger parce que bon, j'ai pas de seins quoi). Mon directeur de mémoire m'a maté la poitrine pendant 1h et a fait (sans rapport) des blagues machistes auxquelles je n'ai pas ri.

Enfin, je ne sais pas dans quelle ville ou dans quel pays il fait bon vivre. Mais ici, trop de choses sont devenues banales. Je ne sais même plus si j'ai espoir que ça s'arrange.

Alice a dit…

Stéphanie, non tu n'as fait AUCUNE erreur. C'est le gars qui est pas bien dans ses testicules. J'espère que ça n'a pas trop pesé dans la balance pour ta note. Ca me révulse ce genre de comportement, surtout dans un tel contexte de défense de mémoire avec tout ce à quoi ça mène: orientation d'étude, futur pro, etc. J'admire ton courage d'être restée de marbre face aux blagues.

Pour les villes, je ne sais pas. Chez mes parents c'est beaucoup moins stressant de sortir seule qu'à Paris où là où j'ai fais mes études. Mais je ne crois pas que le nombre d'habitants y fasse grand chose.